
Le moins que l’on puisse dire, c’est que le plateau 2025 dépasse ce qu’on a vu depuis une dizaine d’année au Mans. Il faut en effet remonter à la fin du siècle dernier lorsque, en 1999, l’ACO pouvait afficher plusieurs marques prétendantes à la victoire, que celles plus nombreuses présentes cette année (Alpine-BMW-Cadillac-Ferrari-Peugeot-Porsche et Toyota). Sans oublier Aston qui démarre son programme endurance en Hypercar !
A seule différence que globalement, en 2025, sept marques donc sont à ranger dans le lot des prétendantes, alors qu’en 1999, elles n’étaient que quatre (Audi, BMW, Mercedes et Toyota) avec quand même deux outsiders courageux mais pas vraiment en mesure d’aller lutter aux avant-postes.
Penchons-nous donc sur cette liste ‘gargantuesque. A quelques encablures du début de la très, très longue semaine mancelle, désormais c’est le vendredi de la semaine précédant le baisser du drapeau tricolore qui lance les 24 Heures, que débuteront les traditionnelles opérations de pesage, place de la République, au cœur du Mans.
Trois favoris expérimentés : Ferrari, Porsche, Toyota

Le Championnat du monde d’endurance WEC 225, a déjà commencé, avec déjà trois épreuves disputées (Qatar-Imola et Spa) et un favori logique se dégage … Ferrari, le double tenant du titre en Sarthe – victorieux en 2023 et 2024 pour son grand retour au Mans – qui avec trois voitures engagées, semble avoir déjà tout mis dans le bon ordre, pour tenter de rééditer ses exploits des deux dernières éditions.
Au Mans, il faut de la performance, de la fiabilité, une organisation sans faille mais aussi une expérience très spécifique de la gestion de course.
La Scuderia possède tout cela. Juste un petit bémol car on a entre-aperçu quelques petites failles du côté humain avec des équipages pas vraiment totalement convaincus de la hiérarchie interne définie par l’équipe d’Antonello Coletta.
Et puis tout récemment, à Spa, il y eut cette alerte sur la ‘’troisième voiture’’… Un souci de turbo est venu contrarier la bonne marche du dispositif pourtant bien rodé de Maranello !

Alors, même s’il est impossible de ne pas hisser tout en haut de classement des favoris, les belles rouges et la belle jaune – les couleurs de la ville de Modéne – me souffle l’ami Gilles Gaignault, Modéne ? le berceau de Ferrari, , on sait la rudesse de la course mancelle.
Alors, chez Ferrari, même si l’énorme expérience accumulée lors de ces deux dernières années reste une garantie, rien n’est écrit d’avance…
Même pour le Cavallino Rampante !

Depuis le début de saison, c’est une tout autre histoire que celle de Ferrari pour l’autre monumentale marque qu’est la rivale, la firme Allemande Porsche, maintes fois victorieuse en Sarthe… A 16 reprises devant Audi qui en totalise 13 !!!
En mondial WEC tout du moins, puisque on a vu les hybrides de Weissach, bien souvent à la peine lors des trois premières courses de la série FIA.
Curieusement out le contraire de l’autre Championnat d’endurance celui de l’IMSA aux USA, puisque, outre Atlantique, les 963 dominent leurs rivales sans coup férir (4 courses, 4 victoires) dont les prestigieuses 24 Heures de Daytona et les non moins célèbres 12 Heures de Sebring !
Évidemment, lors des courses du WEC, pas grand-chose à redire sur la gestion de course des allemandes. Mais visiblement une BOP (Balance of Performance) rigoureuse, les limite en perfo et désormais, dans ce paquet de furieux des Hypercars du WEC, pas de pitié pour ceux qui ne suivent pas le rythme effréné imposé par Ferrari.

Tout cela se joue à pas grand-chose mais dans un monde ou désormais, chaque seconde compte, il ne fait pas bon trimbaler une once de handicap supplémentaire.
Argument massue en faveur pourtant de Stuttgart : le nombre puisqu’avec les trois 963 ‘ officielles alignées par le très professionnel Team de Roger Penske et une par l’écurie ‘privée Proton (et même possiblement une cinquième actuellement en position d’attente car sur la liste des suppléantes) Porsche possède, avec ses 963 une escadrille conséquente.
Et c’est toujours un solide argument au Mans… Si l’on y ajoute l’expérience …

Troisième marque favorite logiquement …Toyota en retrait en ce début de saison, mais la firme Nipponne possède quand même le plus beau palmarès récent sur l’épreuve Sarthoise.
Nantie de cinq victoires (2018 à 2020 avec la TS 050 Hybrid et 2021-2022 avec la GR010), la marque Japonaise a acquis une extraordinaire expérience de la course mancelle.
Il serait complètement stupide de ne pas croire que sans doute handicapée par une BOP sans concession, l’hybride Nipponne est devenue une voiture quelconque…
D’autant que les hommes n’ont pas beaucoup changé et que l’organisation nippo-européenne est toujours aussi redoutable à l’heure du money time.
Il faudra, tout au long des deux tours d’horloge, suivre attentivement, l’évolution des deux Toys, celles-ci ne seront sans doute pas très loin du graal le dimanche15 juin à 15h30.
BMW, Cadillac et Alpine, de redoutables outsiders

Si les marques monumentales du Mans se retrouvent encore en haut de la liste des pronostiqueurs, trois autres pourraient bien elles-aussi participer à la fête.
Victorieux après avoir créé une colossale surprise
en juin 1999, les Bavarois de BMW semblent sur la bonne voie pour rééditer l’exploit qui les vit surprendre les Audi, Panoz, Toyota et autre Courage lors de l’édition de la dernière année du XXème siècle.
Les BMW M Hybrid V8 fort bien gérés par l’équipe Belge du Team WRT que manage avec talent l’ancien pilote Vincent Vosse, ont été vues à leur avantage lors des trois premières courses du mondial WEC 2025.

Fort bien pilotés par des pilotes d’expérience tel le Danois Kevin Magnussen, qui débarque en endurance cette année en provenance de plusieurs saisons de GP en F1, les protos de Munich ont de sérieux arguments à faire valoir.
Attention quand même aux excès d’agressivité. On sait bien que la course automobile en général et Le Mans en particulier, n’a rien d’une poésie romantique mais la rugueuse prestation du toujours aussi rapide Néerlandais Robin Frinjs à Spa… ne fut pas exempte de tout reproche !
Et gare, car au Mans, le mélange entre les Hypercars, les LMP2 et les GT3, n’est jamais chose aisée pour les pilotes qui doivent tracer leurs routes, dans un trafic qui parfois entraine des accrochages et accidents !!!
Dans les Ardennes Belges tout dernièrement, une des 9X8 Peugeot, victime d’un ‘block pass… du Néerlandais en a porté les traces !

Une autre marque pourrait bien enfin se distinguer dans la Sarthe. Cadillac en effet revient du côté des Hunaudières avec cette année quatre voitures.
C’est dire si les Américains de General Motors ont des ambitions.
Ayant construit le début de sa légende au Mans dès 1950 avec à l’époque, ce qui restera quand même comme l’une des plus laides autos de course jamais engagées, ce n’est pas pour rien que les Manceaux l’appelaient ‘’Le Monstre’’, on retrouve tous les ans avec le même bonheur le grondement rauque d’un bloc moteur made in US.
Trois équipes différentes géreront l’offensive. Deux américaines, la structure de Wayne Taylor et celle d’Action Express Whelen.
Une anglaise, tout simplement celle managée cette année par le Team Jota qui au Mans réalise souvent des prouesses.

Mais si l’armada impressionne par son nombre, elle semble bien moins à l’aise que les saisons passées. Depuis le début la série 2025, ne le cachons pas les Cads ont été à la peine face à une adversité qui a haussé le ton.
Pourtant bien pilotés, les Cad V-Séries-R de Detroit semblent fort mal digérer les ajustements de la BOP qui pourtant leur laissent quand même quelques arguments.
Souvent bien moins ‘’pénalisées’’ que les Ferrari, les Porsche ou les Toyota, les protos ‘yankees joueront sur leur nombre et leurs performances, toujours intéressantes au Mans.

Dans un précédent papier (voir lien), nous présentions Alpine et Peugeot, les deux marques Françaises qui cette année devraient pouvoir donner quelques espoirs aux afficionados tricolores.
Surtout la marque de Dieppe qui reste sur trois podiums en mondial WEC (un en 2024 mais déjà deux en 2025) !
Nous avons surtout retenu la manière à Spa. Fred Makowiecki qui a rejoint les ‘ Bleus cette saison, après des années chez Porsche, apporte incontestablement un plus technique mais aussi humain.
Le pilote originaire d’Arras, semble en parfaite osmose avec Nicolas Lapierre, le nouveau directeur sportif de la marque et on sent un bel entrain chez les hommes en ‘Bleu, avant d’aborder la nuit mancelle…

Restera évidemment à être dans le rythme et sur les conclusions d’Imola puis ensuite de Spa, on peut être certain, qu’il y a un gros potentiel qui ne demande qu’à être vérifié sur le tarmac manceau…
Mais la aussi, rappelons la lourde déception de l’an dernier, où simultanément et ce peu avant la tombée de la nuit Sarthoise, les deux Alpine quittaient la course …sur casse moteur !!!

La bonne nouvelle venue de Belgique fut sans doute la belle prestation en début de course des deux 9X8 Peugeot.
Reste à se persuader pour la marque Sochalienne de rééditer et à mieux conclure la prestation de 2024 qui vit un instant l’une des lionnes en tête de la course.

Seulement en tout cas cette année … le prix de beauté à la formation Britannique Aston Martin mais quelle ligne et quel chant !
Évidemment, pas vraiment possible de croire que les Aston viendront jouer avec les ténors mais côté chant, on attend avec une certaine impatience le duo sonore des deux voitures anglaises.
Les moins jeunes verseront sans doute une larme en songeant aux années Matra avec cet extraordinaire feulement des fauves ‘bleus dans les Hunaudières.
Il existe des enregistrements qu’un de mes vieux amis conserve religieusement dans un musée.
Les plus modernes se souviendront aussi sans doute d’autres Aston, GT1 celles-là. Mais le plumage vaut le ramage et pourquoi ne pas l’affirmer haut et fort, la Valkyrie de 2025, est sans doute une des plus belles voitures de course vue au Mans, après la Ferrari P4 des années 60… évidemment!
Merci en tout cas de mettre une telle ‘œuvre d’art dans une course qui décidément ne sera jamais comparable à aucune autre…
Jean-Michel LEROY
Photos : Willy CHANTELOUP – Thierry COULIBALY
