Une sacrée journée vécue en cette fin mai 2023, sur une partie du grand circuit Sarthois, entre la ligne droite des Hunaudiéres, les célèbres virages de Mulsanne et d’Arnage et la nouvelle portion …Quelques heures passées sous un magnifique soleil et qui demeureront assurément inoubliables au fond de nos mémoires, pour les deux passionnés des 24 Heures du Mans et ce à quelques jours de l’édition du Centenaire de la prestigieuse épreuve mancelle, les 10 et 11 juin prochains.
En effet, avec mon proche ami et confrère du grand quotidien ‘Le Figaro, Sylvain Reisser, nous avons eu l’honneur et le privilège, s’il en est, d’être invités à nous installer et à rouler dans deux illustres automobiles d’antan, victorieuses autrefois et ce au tout début de la naissance des 24 Heures du Mans en 1925 et 1926.
Les sublimes Lorraine Dietrich. La N°5, la type B3 6 S, victorieuse donc des 24 Heures du Mans, les 20 et 21 juin 1925, avec l’équipage formé de Gérard de Courcelles et André Rossignol. Et la N°6, la type B3 6 S, qui a remporté elle, l’édition suivante, les 12 et 13 juin 1926, avec la paire composée d’André Rossignol et de Robert Bloch
Grace à nos confrères, Henri Charpentier et Bernard Bakalian, les auteurs du merveilleux livre dénommé, les 24 Heures du Mans ‘L’Histoire aux Editions Michel Lafon (Voir lien) nous avons été invités et conviés par les actuels propriétaires de ces deux bolides, à pouvoir rouler sur la ligne droite des Hunaudiéres, et a emprunter ensuite la portion entre les deux virages de Mulsanne et d’Arnage.Pascal Lagreze, originaire de Sarlat dans le Périgord qui posséde la 5 et Philippe Leroux de Chatillon sur Indre, lui, la 6.
Le rendez-vous étant fixé au beau milieu de cette ligne droite des Hunaudiéres, au fameux restaurant des Hunaudiéres chez Genisel, mondialement connu des inconditionnels des 24 Heures !
Et ‘cerise sur le gâteau, nous serons gâtés car les quatre maires des communes qu’empruntent le tracé du grand circuit Sarthois, sont là et avec lesquels nous pourrons au cours du déjeuner, échanger et papoter !Jean Yves Lecoq (Mulsanne) – Eve Sans (Arnage) – Carole Heulot (Ruaudin) – Iréne Boyer (Moncé-en-Belin)
UN PEU D’HISTOIRE…
Pascal Lagreze nous raconte l’histoire de sa Lorraine Dietrich la N°5. « Mon père Michel à eu sa première Lorraine Torpedo, carrossé par Gaston Grumer. Puis, il a acheté en 1975, la N°4, 3éme du Mans en 1925, celle qui se trouve au Musée des 24 Heures. Il l’a entièrement refaite grâce à Marcel Gregory, le bras droit de Sylvain Floirat, qui avait été autrefois mécanicien chez Lorraine Dietrich. Et c’est en recherchant des pièces, qu’il tombe par hasard sur le moteur de la N°5 en 1976, à Saint Nazaire et qui se trouvait à l’état d’épave chez le Docteur Le Triguily, grand collectionneur de Salmson! Il va la restaurer comme la 4 à partir de 2006 et pendant de très nombreuses année, jusqu’en 2015, chez lui à Campagnac les Quercy en Dordogne, au sud de Sarlat. Avec on a alors ensuite disputé et participé à des rallyes d’anciennes.»Et il poursuit et nous précise ensuite : « La N°6 de 1926, qui appartenait à un certain Monsieur Sagne, elle a été acheté au Musée de Sarlat en 1992. Elle a été modifiée pour être plus confortable. Cette Lorraine Dietrich avait auparavant été découverte en 1960 par Serge Broussine, un paléontologue. »
Mais que devient la N°6 après la course, Philipe Leroux, l’actuel propriétaire nous narre l’épopée de sa Lorraine N°6: « Elle va déjà être exposée avec son trophée dans la concession automobile de la rue des sablons à Paris. Robert Bloch décide de la garder pour son usage personnel, il fait modifier chez Kelsch l’arrière de la carrosserie afin de l’équiper d’une malle et de 2 roues de secours (plus facilement accessibles). De même il fait retôler en aluminium la carrosserie (en remplacement de la toile). Puis il la revend à monsieur Dionys Geyger (membre de l’usine d’Argenteuil) qui ne la garde qu’un an et en 1931, la revend à un client de la marque : Monsieur Roux, maraîcher à Ballainvilliers au sud de Paris, qui a déjà une 15 CV en carrosserie camionnette.»
Philippe Leroux, poursuit : « C’est en 1972 que Serge Broussine revenant d’une manifestation sur le circuit de Montlhéry au volant de sa Lorraine quatre cylindres, s’arrêtant à un carrefour est interpellé par un vieux monsieur : « Tiens une Lorraine ce n’est donc pas si rare » Immédiatement le jeune collectionneur saute sur le trottoir pour en savoir plus. Il apprend qu’il y a une Lorraine dans une ferme tout prêt d’ici. Ayant relevé l’adresse il se rend sur les lieux et rencontre madame Roux et sa fille, après plus de 6 mois de discussions, Serge Broussine fini par avoir gain de cause, Madame Roux accepte d’ouvrir le garage. En effet il y a bien une Lorraine 15 CV mais c’est une camionnette « Maraîchère ».
Avant de nous préciser: « Quelque peu déçu le jeune passionné décide d’en faire le tour. C’est à ce moment qu’il a un choc, derrière le véhicule utilitaire, il découvre le saint graal… Une Lorraine 15 CV « Sport » en torpédo !!!! Il parvient à racheter la voiture de ses rêves d’enfant. Mais il n’est pas encore au bout de ses surprises, elle est équipée d’accessoires supplémentaires. (Compteur de billard, pompe de mise en pression du réservoir de 100 litres, renforts de tablier, jauge d’huile au tableau de bord, etc…) Poursuivant ses recherches il retrouve Monsieur Geyger qui lui apprend que ce n’est pas n’importe quelle « Sport » mais la voiture … victorieuse au Mans en 1926 aux mains de Bloch et Rossignol. Avec en main le témoignage par écrit par l’ancien propriétaire, le jeune Serge Broussinne réuni toutes les photos prises lors de la découverte et publie un article dans l’Anthologie Automobile :« Une fabuleuse découverte »
Et Philippe enchaîne: « Et il s’attaque à la restauration de la Lorraine, après avoir effectué plus de 10 000 km à son volant, Serge Broussine se sépare de sa voiture. C’est en 1995 que madame Leroux, au nom de la famille, va racheter cette fabuleuse héroïne.»
En 1997, suite à l’invitation de Philippe Pasteau de participer à la parade des pilotes qu’il a créé en 1993, la voiture va retrouver sa configuration d’origine, et c’est avec sa robe de son sacre que la Lorraine N°6 se présente aux yeux du public de la grande épreuve Mancelle.Philippe Leroux, conclut cette belle histoire: « Pour la famille Leroux, la marque à la « double croix » a une place particulière. Maurice Leroux mécanicien chez Lorraine-Dietrich à Argenteuil, y rencontre une jeune secrétaire. C’est le coup de foudre, Maurice et Simone se marient et ont deux enfants Serge et Mauricette. Le jeune Argenteuillais grandi dans ce quartier des Champioux au son des moteurs d’automobiles mais surtout d’avions. Lors de la libération de Paris en 1944, ce jeune garçon de 13 ans certificat d’étude en poche va passer son Brevet de Chaudronnier, puis travailler chez Leguellec dont le « Patriarche » (ancien de chez Lorraine) va le pousser en 1955 à se lancer dans sa propre entreprise. En 1968, Serge Leroux achète un ancien chantier naval à Meulan. Un dimanche il emmène son Père et ses deux fils pour visiter cette future usine. Les 3 générations sont devant la porte en bois, lorsque celle-ci s’ouvre à la surprise générale,Maurice s’esclame « Mais je connais cette usine, j’y ai livré des moteurs marins de chez Lorraine »
Voilà comment deux gamins de 10 ans, Yves et 5 ans Philippe vont être atteints du « virus » pour cette marque.Pour les plus jeunes, précisons que les usines de la marque Lorraine Dietrich, se trouvaient à Argenteuil en région Parisienne. Mais que la marque est nee a Luneville en… Lorraine !Que la firme fut nationalisée en 1936, comme bien d’autres entreprises automobiles, telles Latecoére ou Hispano Suiza.Et que ses usines furent rachetées et reprises par l’entreprise aéronautique Marcel Dassault.
Enfin ultime précisions pour les amoureux de belles anciennes, de ses sublimes bagnoles que ces deux Lorraine Dietrich seront exposées au Musée des 24 Heures du Mans pendant la semaine du Centenaire et ensuite tout le mois de juin. Gilles GAIGNAULTPhotos: Thierry COULIBALY










